La pénurie de sang liée à la crise du coronavirus prouve qu’une meilleure gestion du sang des patients est nécessaire
En Suisse, les stocks de conserves de sang de certains groupes sanguins ont atteint un seuil critique au début de la crise du coronavirus. Malgré les recommandations de l’OMS et de l’ECDC, la gestion du sang des patients en Suisse ne bénéficie pas de l’attention nécessaire. Le pire a été évité grâce aux résultats positifs d’un appel au don, mais ne serait-ce pas le moment de changer d’approche?
Le débat public sur la pénurie de désinfectants, de masques faciaux et de combinaisons de protection a fait oublier que d’autres ressources médicales manquaient également, les conserves de sang notamment. De nombreuses donneuses et de nombreux donneurs sont restés chez eux au début de la crise par peur de la contagion, d’autres étaient malades ou en quarantaine. C’est pourquoi Transfusion CRS Suisse a lancé un Appel au don qui, ajouté à la diminution des opérations chirurgicales prévues, a fort heureusement permis un retour à la normale. Cette situation prouve néanmoins avec quelle rapidité la pénurie de conserves de sang touche la Suisse.
D’autres pays ont fait les mêmes observations. Ainsi, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) (en anglais) a constaté à la mi-mars 2020 que la promotion du Patient Blood Managements (PBM) devait avoir la priorité afin de nous permettre de surmonter la crise du coronavirus. Ce concept ayant fait l’objet de recherches approfondies prévoit un ensemble de mesures qui pourraient réduire considérablement les besoins en conserves de sang. C’est ce que prouvent également des exemples en provenance de Suisse. L’Hôpital universitaire de Zurich a en effet diminué de plus de 40 pour cent le nombre de transfusions sanguines ces dernières années (en allemand ou en anglais). C’est d’autant plus réjouissant que la diminution des transfusions sanguines a également des répercussions positives sur la sécurité des patients.
Dans de nombreux hôpitaux suisses, le Patient Blood Management suscite un vif intérêt, mais n’a été en général introduit que de manière rudimentaire, ce qui est dû, essentiellement, à la complexité des tâches interdisciplinaires. Il est cependant indispensable de relever ce défi en Suisse et dans le reste du monde afin d’être préparé à d’autres vagues infectieuses éventuelles de COVID-19 et à de futures situations de crise. L’OMS (en anglais) incite également dans son cadre d’action à garantir l’approvisionnement en conserves de sang.
La crise du coronavirus constitue un appel à une gestion plus parcimonieuse du sang des donneurs et des patients. Comme mesures d’urgence, un groupe de chercheurs de l’International Foundation of Patient Blood Management (IFPBM) et de la Society for the Advancement of Blood Management a initié un plan en cinq points publié par le magazine spécialisé Anesthesia & Analgesia (en anglais):
- Identifier, évaluer et traiter avec les agents pharmacologiques adéquats les carences en fer et l’anémie des patients traités en médecine ou en chirurgie.
- Identifier les problèmes de coagulation avant, pendant et après l’opération et les traiter rapidement.
- Application de toutes les méthodes efficaces de conservation du sang chez les patients traités en médecine ou en chirurgie.
- Observation attentive de l’état des patients après l’opération et intervention rapide via radiologie interventionnelle et/ou endoscopie lors de saignements inattendus, selon leur origine.
- Information et sensibilisation approfondie des personnels de santé, des patients et de leurs infirmiers sur l’importance du Patient Blood Management.
La motion du Conseiller national Christian Lohr (19.4491) laisse entrevoir que le monde politique est à présent favorable à une mise en œuvre rapide du Patient Blood Management sur l’ensemble du territoire suisse. Tous les acteurs du système de santé suisse sont désormais sollicités pour que les bases nécessaires soient créées le plus rapidement possible.